Metaclassique #196 – Co-exister

« les femmes sont restées assises à l’intérieur de leurs maisons pendant des millions d’années, si bien qu’à présent les murs mêmes sont imprégnés de leur force créatrice ; et cette force créatrice surcharge à ce point la capacité des briques et du mortier qu’il lui faut maintenant trouver autre chose, se harnacher de plumes, de pinceaux, d’affaires et de politique. Mais ce pouvoir créateur des femmes est très différent du pouvoir créateur des hommes. Et l’on est obligé de conclure qu’il serait infiniment regrettable qu’il se trouvât entravé ou gaspillé, car il a été gagné par des siècles de la discipline la plus rigoureuse et rien n’existe qui puisse prendre sa place. Il serait infiniment regrettable que les femmes écrivissent comme des hommes ou vécussent comme des hommes, car si deux sexes sont tout à fait insuffisants quand on songe à l’étendue et à la diversité du monde, comment nous en tirerions-nous avec un seul ? » (Virginia Woolf, Une chambre à soi, traduction Clara Malraux, Éditions Denoël, coll. 10/18, 1997, p . 131-132)

Même si Virginia Woolf ne pousse pas l’expérience de pensée jusqu’à imaginer un monde où il y aurait plus de deux sexes, elle laisse quand même planer l’idée que c’est un peu à cause du fait qu’on n’en a dénombré que deux si l’un s’est tellement vécu en supériorité par rapport à l’autre. Et quand il faut constater que la musique écrite par des femmes reste excessivement minoritaire dans les salles de concert de musiques de création, que se passerait-il si on thématisait le problème en terme de coexistence. Installés à La Cassette, nous accueillons Claire Bodin qui dirige le Centre de ressources et de promotion Présence compositrices, à l’origine de la base de données Demandez à Clara qui sera spécialement « meta-testé » pour Metaclassique par Léonard Pauly et la philosophe Valérie Gérard qui signe aux éditions MF l’essai Les formes du chaos qui propose d’évoluer dans les livres de Virginia Woolf à la recherche des modes de coexistence.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.