Metaclassique #311 – Triper

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Dans Connaissance par les gouffres, Henri Michaux écrit : « Toute drogue modifie vos appuis, l’appui que vous preniez sur vos sens, l’appui que vos sens prenaient sur le monde, l’appui que vous preniez sur votre impression générale d’être, il le cède. »

Henri Michaux est l’une des inspirations du compositeur Fausto Romitelli. Quand, en 1998, l’ensemble bruxellois Musiques nouvelles lui passe commande d’une œuvre qu’il intitule Professor Bad Trip, en référence directe au personnage de bande dessinée inventé par Gianluca Lerici, l’œuvre se veut en plein dans le son, loin du son propre des musiques académiques, même si son élaboration est en dialogue avec les questionnements de la musique spectrale qui domine les débats musicaux de l’époque. Parallèlement à la composition, Romitelli a laissé une œuvre théorique très précise où il cherche à repenser le spectralisme en voulant réorganiser le timbre sur des critères linguistiques.

Pour rentrer en plein dans la matière mentale et sonore de cette œuvre souvent qualifiée d’iconique, nous avons interrogé l’auteur d’un livre dédié à Professor Bad Trip, paru aux éditions Contrechamps, le musicologue Luigi Manfrin (dont les propos seront traduits par Antonella Vignoli). Et puis nous pourrons aussi profiter des expertises de deux proches de Romitelli, le musicologue Alessandro Arbo et le réalisateur informatique Laurent Pottier, qui a travaillé à l’IRCAM avec Romitelli.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #310 – Catastropher

Le tremblement de terre de Lisbonne | Pour la Science

Sous l’Ancien Régime, il ne pouvait pas se passer un opéra sans que la nature s’emballe, déborde et menace l’ordre du monde. Des scènes de tempête aux emportements passionnels, pourquoi fallait il que les éléments se déchaînent pour exister ? Comment ? Ces moments tempétueux sont devenus le climax du rapport de l’homme à la nature pour préparer un retour à l’ordre et exorciser quelques angoisses métaphysiques au passage. En quoi les standards de représentation lyrique des cataclysmes dans les opéras du XVIIIᵉ siècle ont quelque rapport avec la pensée de la catastrophe au XXIᵉ siècle ? Pour instruire la question, Metaclassique est installé dans l’espace musique de la Bibliothèque publique d’information au Centre Pompidou pour recevoir la musicologue Sylvie Bouissou, qui a signé aux éditions Minerve le livre Crimes, cataclysmes et maléfices dans l’opéra baroque en France, et l’historien de l’anthropologie Frédéric Keck, qui a fait paraître aux Presses Universitaires de France l’essai Préparer l’imprévisible.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #309 – Ecouter

L'anatomie de l'oreille

Au siècle dernier, la musicologie parlait beaucoup des formes de l’évolution des procédés de tels compositeurs ou des modèles extra-musicaux de la pensée musicale de tel autre. Mais depuis le début de ce XXIᵉ siècle, la musicologie parle davantage de la musique du point de vue de qui l’écoute, au lieu de croire que le thème est pour autant nouveau. Martin Kaltenecker a proposé à huit autres musicologues d’aller à la recherche de textes qui parlent de l’écoute depuis l’Antiquité jusqu’à aujourd’hui. Il en ressort une anthologie de plus de 1300 pages co-éditée par les éditions MF et les éditions de la Philharmonie de Paris, dans laquelle des textes de musicologues, mais aussi des traités de conversation, des extraits de pièces de théâtre, de romans, puisque tous les modes de discours peuvent alimenter la pensée de l’écoute de la musique. Dans Metaclassique, nous allons prendre l’anthologie par l’un de ces milieux : les XVIᵉ et XVIIᵉ siècles, qui seront respectivement représentés par celles qui s’en sont chargées dans l’anthologie : Isabelle His pour le XVIᵉ siècle et Theodora Psychoyou pour le XVIIᵉ. Mais comme l’une et l’autre ont relevé dans leurs périodes respectives des tendances au comparatisme entre musique à grand effectif et musique à plus petit effectif, entre musique du Nord et musique du Sud, nous ne ferons pas que chronologiquement.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

L'Écoute : de l'Antiquité au XIXe siècle | La Librairie

Metaclassique #308 – Assassiner

Les musiciens de Cold Case

Le 23 octobre 1764, le compositeur Jean Marie Leclair est retrouvé mort à son domicile parisien de trois coups de poinçon. L’événement est hors du commun. Toute la ville est en émoi. Le commissaire Antonin Thiot est chargé de trouver le meurtrier, mais l’affaire est classée sans suite quarante jours plus tard, faute de preuves et sans doute plus encore, faute d’une enquête plus poussée. Si bien que les mystères s’accumulent. Qui l’a tué ? Pourquoi les investigations policières se sont si vite arrêtées ? L’affaire était-elle devenue trop politique pour que l’instruction puisse aller plus loin ? Autant de questions qui resteraient anecdotiques s’il n’y en avait pas d’autres plus pressantes pour qui écoute la musique de Leclair. Est-il seulement possible de faire l’impasse sur les mystères qui l’entourent pour pouvoir l’apprécier ? Et les progrès de la police scientifique peuvent-ils vraiment mieux les éclaircir que la musicologie ? Pour y répondre, nous recevons l’historien de la police scientifique Amos Frappa et la violoniste Hélène Schmitt, qui s’est lancée pour le label Aeolius dans l’enregistrement du Quatrième livre de l’œuvre pour violon de Leclair et qui, pour ce faire, a mené l’enquête sur le cas Leclair, dont l’assassinat n’est pas le seul mystère.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #307 – Distribuer

Orchestre de la Part-Dieu | Auditorium - Orchestre National de Lyon

Dans Le Temps scellé, Andrei Tarkovski écrit qui lui est arrivé une fois d’enregistrer une conversation sans que personne ne s’en aperçoive. Et en réécoutant la bande, il raconte ne pas avoir pu s’empêcher de penser « Quelle écriture géniale, quelle mise en scène, quelle logique dans le mouvement des caractères, quels sentiments, quelle énergie, quelle voix, quel silence ! Tout y était. Aucun Stanislavski n’aurait pu justifier de pareilles pauses, et même le style de Hemingway prenait un air naïf ou prétentieux à côté de ce banal dialogue. »

De cette émotion peut naître une nouvelle manière de noter et de faire attention aux interactions entre les acteurs d’une conversation. Un domaine des sciences sociales s’est même dédié à cette activité qui s’appelle l’ethnométhodologie et qui pratique notamment l’analyse conversationnelle. Ces outils ont été beaucoup mobilisés pour aborder les conversations et mises en scène de la vie quotidienne. En laissant les conversations entre artistes loin de ses enquêtes dans le cadre d’une thèse à l’EHESS, Arsène Caens s’est doté des outils de l’analyse conversationnelle pour se lancer dans un projet d’ethnographie de la consigne musicale. Nous en parlons avec lui, mais aussi avec le poète Jacques Jouet et le pianiste Maroussia Gentet et Julien Blanc.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #306 – Lier

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Quand Brahms disait qu’on ne saurait discuter de la valeur d’une mélodie, il en faisait une valeur suprême, en même temps qu’un sujet hors de portée de l’analyse. Et c’est peut-être en en faisant un quelque chose de si sentimental qu’il échappe à toute raison. Au point que la mélodie est devenue hors sujet, quand ce n’est tabou. Pendant que les uns en magnifient les charmes, les autres en refoulent le côté sucré. Et pourtant : la mélodie aura beau être taxée d’être justement trop consensuelle pour être honnête, trop anecdotique pour résumer la musique ou encore trop subjective par un certain nombre de compositeurs modernistes, ce sont les mêmes modernistes qui ont ouvert et renouvelée la pensée de la mélodie sans doute plus qu’ils n’ont cherché à complètement l’abolir. Pour évoquer les tensions qui ont fait l’histoire de la mélodie au cours des cent dernières années, nous recevons Martin Kaltenecker qui publie aux éditions Contrechamps, l’essai L’expérience mélodique au XXè siècle.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #305 – Moduler

Si la musique peut donner l’impression de changer de couleur sans changer d’instrument, cela peut tenir dans l’évolution de l’harmonie. Une superposition de hauteurs fait un accord qui, lui-même, définit un cadre harmonique et qui, souvent, est porté à évoluer. On parle alors de « modulation » pour désigner le passage d’un cadre harmonique à un autre. Ladite modulation peut alors s’entendre comme une balise au cours de ce qu’on appelle couramment un parcours harmonique. Ces considérations forcément techniques sont aussi des vérités artisanales. Et, d’ailleurs, cela peut être à sa manière de moduler que l’on va reconnaître telle manière de composer. C’est-à-dire que la modulation peut devenir une marque de fabrique. De Schubert à Brassens, il est justement des musiciens que l’on peut reconnaître à leurs façons de faire modulation. Et puisque c’est là ce qui les réunit, c’est sans doute par là qu’il serait intéressant de les distinguer et c’est l’exercice auquel Metaclassique a invité deux musicologues. Accueilli par la Médiathèque Musicale de Paris, nous recevons Etienne Kippelen pour représenter Georges Brassens pour la simple et très bonne raison qu’il est l’auteur de l’essai Brassens & la musique. Une question d’harmonie publié par l’Université de Provence et Claude Abromont pour défendre la musique de Franz Schubert parce qu’il est joueur, mais surtout incontournable en questions harmoniques et qu’il fait d’ailleurs paraître un Précis d’analyse des formes musicales aux éditions Minerve. Claude Abromont qui a déniché une version du Voyage d’hiver pour voix et… guitare.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #304 – S’adapter

On ne compose pas de la même façon selon que l’on travaille sur un instrument ou un autre. Et dans l’hypothèse où on ne compose même pas la même chose en fonction du piano que l’on utilise, la musicologie s’est ouvert de nouveaux horizons depuis qu’elle regarde les Sonates que Beethoven compose pour le piano en vis-à-vis des différents instruments qu’il a pu avoir sous les doigts. Pour chercher comment les mutations du style musical sont en rapport direct avec le passage du compositeur d’une marque de pianoforte à une autre, nous recevons Cyril Van Ginneken qui pratique le piano moderne et qui s’est vu remettre le Prix en recherche artistique 2024 au CNSMD de Lyon, en partenariat avec Metaclassique. Et comme son travail de Master à la Haute Ecole de Musique de Genève portait sur « L’influence des évolutions de la facture du piano dans l’œuvre pour piano de Ludwig van Beethoven », il s’entretiendra au cours de cette heure avec le pianofortiste Luca Montebugnoli, spécialiste des pianos des premières années du 19è siècle et qui fait justement paraître sur le label Evil Penguin, une version de la Symphonie Eroïca de Beethoven jouée sur un pianoforte français, du facteur Sébastien Erard.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Conservatoire National Supérieur Musique et Danse de Lyon - Billetterie  officielle
Luca Montebugnoli, Ludwig Van Beethoven, Franz Joseph Haydn, Christoph Willibald Von Gluck - 1

Metaclassique #303 – Franciser

(c) Morgane Vie

Sous le règne de Louis XIV, la musique française a tout fait pour se distinguer de la musique italienne. Au lieu de faire des opéras, on a préféré faire des tragédies lyriques. Au lieu de faire des Sonates, certains ont parlé de « sonades ». Et quand on s’est mis à faire des Cantates, on a cherché à franciser le genre italien en y mettant des paroles en français, en suivant les inflexions de la langue française, en faisant des rythmes pointées à la française… mais comme il n’était quand même pas question de bouder les plaisirs des vocalises à l’italienne, il est maintenant compliqué d’interpréter les Cantates françaises sans aller jusqu’à les franciser plus qu’elles ne pouvaient l’être par les musiciens français de l’époque qui étaient d’ailleurs d’origine italienne pour les uns et n’étaient pas loin de faire comme si pour certains autres. Ce numéro « Franciser » de Metaclassique a été intégralement enregistré au Centre de musique baroque de Versailles en parallèle d’une formation sur les cantates françaises, dispensée par toutes celles et ceux que vous entendrez dans l’heure qui vient, à savoir, dans l’ordre d’apparition : le musicologue et responsable éditorial du CMBV Julien Dubruque, la chanteuse Chantal Santon, le chercheur et directeur artistique du CMBV Benoît Dratwicki, le violoniste Benjamin Chénier et la claveciniste Violaine Cochard.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #302 – Dépouiller

Quatuor Lontano en concert à Notre-Dame de Toute Grâce

Il n’est plus complètement sûr que se déplacer aux urnes renforce l’ardeur démocratique. Mais dans le même temps, il est pratiquement certain que d’être sollicité à voter pendant un concert de création musicale pour l’œuvre que l’on sent se détacher, ouvre l’appétit et aiguise l’attention au cours du Festival des musiques d’Assy. À l’occasion d’une après-midi où se suivaient plusieurs concerts de création, le public a été invité à voter pour remettre un prix du public dont le moment du dépouillement était aménagé spécialement pour accueillir les micros de Metaclassique.

Au cours de cette heure, nous irons à la rencontre de la directrice artistique des Musicales d’Assy, la violoniste Pauline Klaus, qui, avec le Quatuor Lontano, a créé quatre pièces mises au concours, mais aussi des extraits du premier quatuor du compositeur Christophe Maudot, avec lequel nous échangerons aussi, mais encore la harpiste Constance Luzzati, qui a créé cinq pièces pour harpe, dont celle de Maarten Lingier, qui était lui aussi sur le plateau avec la douzaine de personnes qui se sont jointes au dépouillement, dont les mots laissés par le public pourront donc augmenter l’écoute des créations enregistrées à l’église Notre-Dame de Toute Grâce du Plateau d’Assy qui, au milieu des années 1940, a été le cœur névralgique d’une controverse parce que le père Couturier a commandé des œuvres à Georges Braque, Fernand Léger, Jean Lurçat, Germaine Richier, Marc Chagall, Henri Matisse… Autant d’œuvres qui font de cette église un musée et un lieu de créations d’artistes pas forcément catholiques, en plus d’être un lieu de culte catholique.

Metaclassique #301 – Décorer

On sait qu’au moment d’interpréter ses propres œuvres, Mozart continuait d’improviser et devait très probablement décorer ses sonates d’embellissements ajoutées sur le vif. Il est donc presque certain qu’il ne faut pas s’en tenir à ce qui est écrit sur ses partitions pour restituer l’esprit de la musique de Mozart. Et quand il devait laisser inachevé tel ou tel Menuet, ce n’est sûrement pas qu’il considérait qu’il était mal parti et qu’il y avait là une matière musicale de moindre qualité, mais parce que la suite lui semblait peut-être implicite ou aller de soi, dans le fil des décorations dont un musicien se doit d’embellir les partitions qu’il porte à l’oreille des auditeurs. Pour ce numéro « Décorer » de Metaclassique, nous nous entretenons avec le pianiste et musicologue Robert Levin dont la vie a changé de cap le jour où il s’est aperçu que, pour compléter les œuvres inachevées de Mozart, il fallait donc improviser. Un entretien enregistré dans le cadre du festival des Ecoles d’art américaines de Fontainebleau. 

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.

Metaclassique #300 – Exister

Dans un essai marquant – et presque traumatisant – intitulé La Haine de la musique, Pascal Quignard décide que « Les salles de concert sont des grottes invétérées dont le dieu est le temps. » Au pied de la lettre de Quignard il y aurait donc à se demander si un compositeur qui en aurait conscience pourrait alors survivre à son temps. Et s’il fallait aller jusqu’à acter la dilapidation des êtres composants devant les gouffres du temps, on ne parlerait jamais du même Gabriel Fauré s’il fallait l’évoquer du point de vue du rituel en forme de cap qu’est, là, le centenaire de sa mort. Comme si la musique de Fauré manquait à sa consistance et, pour ne pas totalement s’évaporer, devait se définir par ce manque. Au bout d’un moment, c’est même à se demander si Fauré a vraiment voulu que sa musique existe, s’il n’a pas préféré la maintenir à un niveau d’existence justement chancelant. Pour enquêter autour de cette idée et à l’occasion de ce 300è numéro de Metaclassique, on va faire plein de choses : demander au musicologue spécialiste des étendues Ange Ailli en quoi Fauré n’a peut-être pas tant que ça existé, organiser un salon littéraire autour de ses textes de référence avec Sylvie Gouttebaron, Johan Faerber et Alahin Badihou. Pour commencer, suivre la médiatrice de la musique Camille Villanove qui organise des promenades musicales dans les rues de Paris et qui nous emmène sur les traces de Fauré, boulevard Malesherbes.

Une émission produite et réalisée par David Christoffel.