Dans La crise de la musique contemporaine et l’esthétique fondamentale, Jean-Marc Chouvel écrivait que « Le terme de ’’musique savante’’ froisse l’oreille de bien des compositeurs qui y voient une accusation d’ésotérisme peu compatible avec la vocation universelle de toute musique ‘’vivante’’. » Le compositeur et musicologue ajoute que « Dans toutes les cultures, l’accès à l’œuvre d’art, que ce soit pour sa pratique ou pour son appréciation, présuppose une certaine initiation, et cela peut aller d’une simple acculturation passive à un cheminement bien plus ésotérique. » Autrement dit, ce n’est pas le propre de la musique contemporaine que de demander à qui l’écoute de s’y habituer, de s’y acclimater, de s’y accoutumer. Mais si les forces vives de la musique contemporaine peuvent se sentir en peine, c’est parce qu’en plus d’une injonction à la compréhension immédiate, leur arrive la vive sensation d’être jugé comme une voiture de série dans un salon de l’automobile, quand ce n’est l’impression de devoir justifier leur façon de faire de la musique.
Lui-même traversé par le sentiment d’une crise, le compositeur Maël Bailly s’est engagé dans une thèse intitulée : « Changez d’adresse. La musique contemporaine à l’épreuve d’un dépaysement », pour laquelle il a voulu interroger des compositeurs et compositrices et recueillir leurs ressentis et leurs réflexions sur l’état de la musique contemporaine. Metaclassique a passé commande à Maël Bailly d’un volet radiophonique de cette enquête où une dizaine de talents émergents témoignent de la manière dont ils se sentent traités par le milieu, improprement comparés aux musiques de marché et parfois trahis par la tenace impression de se sentir redevables d’explication pour rendre leur musique plus accessible à un large public. Et dans l’espoir de neutraliser quelques parasitages de réputation et de tenter de maintenir au premier plan la qualité de leurs raisonnements, les personnes interrogées par Maël Bailly ont délibérément été maintenue dans l’anonymat, sans que leur voix n’ait pour autant été floutée.
Une émission produite et réalisée par David Christoffel.
Les pièces musicales en écoute dans l’émission sont : D’une étincelle et De un umbral vacante de Maël Bailly, interprétées par Nicolas Arsenijevic (saxophone) et Claire Merlet (alto)
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