À propos d’un anonyme bègue « qui se défendait de l’angoisse par les saccades de l’inarticulé », Michèle Cohen-Halimi explique dans le 5è numéro de la revue Senna Hoy, que « Le souvenir de ses premières séances de cinéma ne l’avait pas quitté. Il revoyait le pianiste qu’un espace insuffisant entre son piano et l’écran empêchait d’accorder la musique au défilé des images, et qui s’abandonnait à la désynchronisation de ses impulsions et du film. Les meurtres s’accomplissaient en valses, les scènes d’amour se doublaient de marches militaires »
Quand ils n’ont plus besoin de savoir si telle musique est encore descriptive tant elle est décidément contemplative, les auditeurs des musiques de Federico Mompou ou de Niccoló Castiglioni peuvent s’identifier à cet anonyme dont Michèle Cohen-Halimi déduit qu’ « Il surpassait la négativité du monde par le désespoir de son imagination. » Même s’ils n’ont pas les mêmes maîtres en musique, même s’ils n’ont jamais qu’une génération d’écart et qu’ils vivent et composent de part et d’autre de la Méditerranée, Mompou et Castiglioni ne sont jamais rapprochés par les programmes de concert, les émissions de radio. Jamais les colonnes des journaux ou les recommandations des algorithmes des plateformes de streaming ne les associent, alors que tous les deux cultivent la simplicité jusqu’à développer, au 20ème siècle, une musique savamment contemplative. ce numéro de Metaclassique propose de mettre en miroir ces deux contemplatifs, en recevant Laurent Feneyrou qui, avec Angelo Orcalli, a publié aux éditions Aedam Musicae, Un musicien en hiver, un volume qui rassemble des essais et entretiens du compositeur Niccoló Castiglioni ; Jérôme Bastianelli qui a fait paraître chez Actes-Sud la monographie Federico Mompou, et les pianistes Guillaume Coppola et Ester Pineda qui ont tous les deux enregistrés le compositeur catalan.
Une émission produite et réalisée par David Christoffel.
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